Je me rappelle la toute première fois que j’ai entendu la musique saillante et caractéristique d’Insomnium. Une fraîche nuit d’automne, nous rentrions d’un concert en Alsace avec mon groupe. La température dans le van ne devait pas excéder les quinze degrés et nous traversions la forêt dans le brouillard. La playlist Spotify défilait et quand « While We Sleep » est arrivée, je me souviens avoir été transpercée par cette mélodie qui se prêtait tout particulièrement à notre environnement du moment. Cela remonte maintenant à pas mal d’années et j’ai toujours eu plaisir à écouter Insomnium mais pour autant, je n’avais jamais eu l’occasion de pouvoir les apprécier en live. Cet été, à l’annonce de la tournée européenne 2023, j’ai donc décidé de remédier à ça. Je remercie vivement Oktober Promotion pour l’accréditation.
Mercredi 8 novembre, c’est sous une pluie battante que je prends la route vers le Casino de Saint-Nicolas. J’arrive relativement tôt et je suis heureuse de pouvoir siroter au chaud un soft au bar lounge situé au rez-de-chaussée. Je ne m’étais jamais rendue dans cette salle et je dois dire que j’ai été très agréablement surprise. Une fois à l’étage, je découvre un endroit atypique avec une décoration au style plus proche d’un théâtre que d’une salle de concert, avec des arcades et un grand lustre. C’est magnifique.
Bref, nous ne sommes pas là pour l’architecture, entrons dans le vif du sujet.
Kvaen
On commence la soirée en douceur avec le projet suédois KVAEN. Mené par le guitariste chanteur Jacob Björnfot, le quatuor propose un set black metal avec une touche pagan. Ça bouge très peu sur scène mais musicalement c’est bien exécuté et on se laisse facilement prendre au jeu. Une bonne entrée en matière d’environ trente minutes pour se chauffer.
In Mourning
On change de direction musicale pour se rapprocher doucement d’Insomnium avec In Mourning et leur death metal progressif. J’ai pris une claque dès les premiers accords avec ce deuxième groupe lui aussi venu de Suède que je découvrais ce soir-là. Ici, les interactions entre les musiciens sont nombreuses, ça bouge pas mal et, fait assez rare pour le souligner, une très bonne visibilité est accordée au batteur. Quel plaisir de pouvoir apprécier le jeu et les mimiques du cogneur ! Celui-ci est totalement à découvert, ses quatre comparses se sont positionnés équitablement de part et d’autre de la batterie : trois guitaristes chanteurs qui se répartissent les riffs accrocheurs et les mélodies plus planantes et un bassiste qui assoit le tout impeccablement. Je reste sous le charme de cette formation durant les quarante minutes de set.
Insomnium
Dernier changement de plateau, tout l’espace de la scène est libéré pour accueillir la tête d’affiche. La monstrueuse batterie de Markus Hirvonen est dévoilée sur son estrade. Puis, avec un peu d’avance sur le running order, Insomnium fait son entrée sur “1696”, qui est également la première piste de l’album “Anno 1696” paru en début d’année. A côté de moi, un petit garçon avec un t-shirt à l’effigie du groupe, brandit une pancarte “CAN YOU PLAY WHILE WE SLEEP”. Intérieurement j’espère que son vœu sera exaucé.
Le guitariste Jani Liimatainen, actuellement en tournée avec Stratovarius, est remplacé par Nick Cordle. Malgré ce changement de line-up, le groupe nous régale scéniquement et musicalement. La tournée est à peine commencée, seulement deux dates en Angleterre et une date à Paris ont eu lieu, mais la complicité est déjà établie. Sans vouloir me retrancher dans les clichés, je ne m’attendais pas vraiment à cela de la part d’un groupe de death mélodique nordique ! Le guitariste Markus Vanhala est une vraie pile électrique, il semble habité pendant ses solos et se donne en spectacle au plus près du public à de nombreuses occasions pour notre plus grand plaisir.
Je suis frappée par la qualité du son qui est incroyablement proche de ce que l’on peut entendre sur les albums studio. C’était l’une de mes craintes avant le concert, je me demandais si cette ambiance aussi particulière pourrait être reproduite en live. Eh bien je n’ai pas été déçue. Les growls de Niilo Sevänen semblent venir tout droit du fond d’une caverne et la réverbe sur la caisse claire est juste ENORME. On s’en rend particulièrement compte sur l’intro de “The Primeval Dark” en fin de set où chaque frappe donne l’impression d’un coup de canon. Sur les quelques secondes d’enchaînement avec “While We Sleep”, le bassiste chanteur regarde le petit garçon à la pancarte et lui fait un signe insistant pour qu’il la montre à nouveau, ce qui ne manquera pas de nous faire rire. Le jeune fan aura droit à une ovation en montant sur scène à la fin du titre.
Pendant près d’une heure trente, Insomnium se livre aux spectateurs sans retenue. Je reste ébahie, profitant de chaque instant. Ils nous ont tout simplement émerveillé. J’attendais cette date avec impatience et je dois avouer que ça a été au-delà de mes espérances.