Pour la petite histoire, le Fortarock est un festival qui se déroule depuis dix ans à Nimègue, aux Pays-Bas. Et, bien que ses affiches soient relativement prestigieuses, cela reste un événement à taille humaine. Malgré une météo mitigée l’an dernier, l’expérience vécue là-bas était si positive que je me faisais une joie d’y retourner.

C’est donc très motivée que je suis entrée sur le site du festival le 1er juin dernier pour découvrir en live les Australiens de Ne Obliviscaris et leur metal progressif à tendance expérimentale. En effet, c’est très difficile de qualifier le style de ce groupe tant son univers est vaste. Mais une chose est sûre, ils parviennent à marier une multitude d’influences avec aisance et cohérence. Et, alors que l’on vient à peine d’arriver, le groupe nous emporte déjà dans une autre dimension. Superbe !

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Sans mauvais jeu de mots, le stoner lancinant de Monolord qui suit sur la seconde scène, sous tente, me semble monotone et ne me convainc pas. Je préfère le metalcore, somme toute très facile, des Américains d’Atreyu. Le show est super énergique et les refrains efficaces. Tout semble réglé au millimètre… Et pourtant ! J’apprends dans le photopit que c’est le batteur du groupe qui assure le chant aujourd’hui. Même si les fans l’ont forcément remarqué tout de suite, les novices n’y ont vu que du feu. Chapeau ! J’ai beaucoup aimé leur reprise du tube de Bon Jovi, « You Give Love A Bad Name », qui a fait chanter toute la plaine du festival.

On repart s’abriter du soleil brûlant maintenant pour écouter les Norvégiens d’Enslaved. J’avais déjà eu l’occasion de les voir par deux fois, mais n’avait jamais été réellement conquise. Le son est tellement bon aujourd’hui que l’on peut entendre toutes les subtilités de leur musique et la beauté qui se dégage des morceaux moins typés black. Le voyage astral est assuré, on plane complètement en parcourant la discographie nuancée du groupe.

On ne change pas tellement d’ambiance avec Myrkur qui investit la mainstage. Une fois n’est pas coutume, l’enchanteresse Amalie Bruun se produit en plein jour et, surprise, arbore fièrement son ventre rond. C’est l’occasion aussi d’enfin voir le visage des musiciens qui l’accompagnent. Même si la musique de Myrkur est plus propice à l’obscurité, le show ne manque pas de mysticisme et la voix de la chanteuse me donne toujours autant de frissons, qu’elle soit angélique ou démoniaque. Le moment est splendide.

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Je fais un passage éclair devant les Britanniques d’Uncle Acid And The Deadbeats. Je ne suis pas hyper fan de leur stoner / doom, mais j’ai surtout une interview avec Ne Obliviscaris. Heureusement que le site du festival n’est pas immense, cela me permet de retrouver rapidement le point presse. Je serre un peu les dents quand, en plein entretien, j’entends l’intro de « The Bee » retentir. En effet, je suis en train de manquer le début d’Amorphis… Ce n’est pas si grave, car j’ai largement eu l’occasion de les voir durant ces trois dernières années. Quoi qu’il en soit, je suis quand même heureuse d’assister ensuite à la moitié de leur set pour entendre des morceaux que j’adore, tels que « Silver Bride », « Wrong Direction » ou encore le célèbre et sublime « House Of Sleep » qui conclut cette belle prestation.

C’est à présent au tour de Cult Of Luna et le public semble conquis par leur doom varié et rythmé. Personnellement, cela ne me dérange pas, mais je ne suis pas transportée. Je partais un peu dans le même état d’esprit à l’approche du concert de Children Of Bodom, les ayant déjà vus trois fois sans y prendre réellement de plaisir. Mais ce soir, je trouve ça super ! Outre la bonne humeur apparente des musiciens et l’excellente ambiance qui émane du public, on entend absolument tous les instruments distinctement. Je n’en reviens pas ! Le choix de setlist était aussi judicieux, le groupe naviguant habilement entre ses hymnes, parmi lesquels on compte notamment « Are You Dead Yet », « In Your Face » ou encore « Downfall », et ses nouveaux morceaux issus de son dernier album, « Hexed », sorti en mars dernier.

Bloodbath a beau être une référence du death metal, je n’y connais rien et je ne sais vraiment pas à quoi m’attendre en voyant débarquer ces drôles de types ensanglantés. Pour la première fois de la journée, les lumières sont catastrophiques, la dominante est rouge et les fumigènes n’arrangent rien. Je râle un peu, mais au-delà de ça, j’en prends plein les oreilles. Quelle ambiance, quelle énergie ! Je ne suis pas certaine d’avoir tout compris, mais j’ai adoré cette prestation.

Ah Behemoth ! J’étais enthousiaste à l’idée de les shooter, ça faisait un bail. Malheureusement, le début du show des Polonais est sensiblement identique à tous ceux que j’ai vus depuis la sortie de « The Satanist ». Avec l’arrivée de « I Loved You At Your Darkest » l’an dernier, dont les morceaux constituaient d’ailleurs la majorité de la setlist, j’espérais autre chose visuellement parlant… J’ai donc été un peu déçue. Néanmoins, que l’on aime ou non leur black mainstream, on se doit de reconnaître le professionnalisme, l’énergie et la précision des musiciens. Cette dernière, sublimée par la qualité du son qui nous est offert. Enfin, mon dépit ne m’empêche pas de faire l’andouille sur certains hymnes du groupe, dont « Blow Your Trumpets Gabriel » ou encore « Chant For Ezkaton 2000 » et son riff infernal. Enfin, c’est sous une pluie de paillettes noires que Behemoth tire sa révérence et clôture la première partie de ce Fortarock.

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Enfin, pas tout à fait… Pour les plus téméraires, il reste la prestation d’un groupe nommé Ploegendienst, qui a l’air de jouer du hardcore. Cela, sur une troisième scène (« Hank’s Garage »), plus petite, que je n’ai pas encore évoquée. Et pour cause, si l’on veut assister entièrement aux concerts sous la marquee, il est impossible de visiter ce podium supplémentaire qui propose des groupes plus underground.

Contre toute attente, la nuit a été agréable et reposante, donc l’enthousiasme est toujours bien présent à l’abordage de ce deuxième jour de festivités qui commence avec les jeunes Anglais de Savage Messiah et leur heavy plutôt efficace.

Cette première prestation a pu sembler banale, mais c’est loin d’être le cas pour la deuxième… Alors que l’on s’attend à voir Allegaeon, ce sont les Américains de Car Bomb qui se présentent à nous avec un metal hyper complexe, destiné aux oreilles averties. Le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est original. Bien que le groupe n’était pas prévu, leur mathcore semble faire excellente impression. Pour ma part, si je n’avais pas été à jeun, j’aurais sûrement eu le mal de mer…

On s’évade ensuite au pays des licornes avec Gloryhammer et leur power metal transposé dans un univers complètement délirant. Avec son armure en cuir vert et son legging argenté, le chanteur ressemble à une grenouille de l’espace. Malgré sa dégaine, on est tout de même impressionnés par sa performance vocale de haut niveau.

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Changement radical après avec Decapitated dont le death metal acéré me fait l’effet d’une droite en pleine figure. Même si le groupe ne propose pas de mise en scène particulière, les musiciens sont captivants, le chanteur en tête. Quelle énergie ! Un gros coup de cœur pour ce groupe que je n’avais jamais écouté.

L’après-midi est superbe et je profite d’un moment sur l’herbe au détriment du stoner de Kadavar qui résonne au loin. Ce n’était pas plus mal de faire une pause avant le concert le plus glauque de tout l’univers donné par Batushka. La scène s’est transformée en église, il y a des dorures, des icônes et des bougies partout. Bougies, que le chanteur a pris le temps d’allumer une à une avant d’entamer sa litanie diabolique, planté derrière son pupitre devant lequel est posé une sorte de reliquaire contenant probablement des ossements. Et en parlant d’ossements, des crânes humains font également partie du décor. Ça sent l’encens, aussi. On aurait pu croire à un one man show, mais les musiciens sont simplement en retrait, fondus dans les tapisseries et les fumigènes avec leurs costumes de cardinaux. J’avais vu Batushka l’an dernier au Graspop et même si le show était particulier, il n’était pas aussi poussé. Ici, les Polonais sont à fond et j’ai un peu la mâchoire qui pendouille après leur set.

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L’ambiance s’allège tout de suite avec Symphony X qui ravit son public avec son prog speedé. Je préfère cependant la mélancolie de Katatonia jouant exclusivement son album « Night Is The New Day », sorti il y a dix ans. Mais ce que j’attends avec impatience aujourd’hui s’en vient enfin : Hammerfall ! Les Suédois se montrent en pleine forme et débitent tube sur tube, voyageant dans leur discographie, dans la joie et la bonne humeur : « Hammer High », « Renegade », « Blood Bound », « Any Means Necessary », « Last Man Standing », « Let The Hammer Fall » et « Hearts On Fire ». Aussi, le groupe propose un extrait de son nouvel album, « Dominion », à paraître en août : « (We Make) Sweden Rock ». Un moment de pur plaisir qui m’a semblé beaucoup trop court !

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Par contre, le passage d’Animals As Leaders me paraît, lui, interminable. Même si le trio exécute ses compos instrumentales complexes à souhait avec brio, l’absence de chant à tendance à m’ennuyer. Mais les amateurs du genre, eux, en prennent plein les yeux et les oreilles.

Soudain, un riff familier retentit au loin, c’est Amon Amarth qui déboule de son drakkar avec « The Pursuit Of Vikings » pour enflammer le public. Je ne suis pas spécialement fan de leur death teinté de folk, mais l’effet qu’ils ont sur la foule est impressionnant. Dans le photopit, j’entends les gens chanter en chœur derrière moi. Dans la foule, tout le monde saute et danse. L’amusement est au rendez-vous du début à la fin du set. Ce n’est pas la pluie qui s’abat sur nous en guise de final qui nous gâche le plaisir. Néanmoins, l’avis de tempête est donné et le site du festival est évacué, à peine les Suédois ayant quitté la scène du Fortarock qui se termine déjà.

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Que dire en guise de conclusion si ce n’est que ce festival était une fois de plus génial ? En effet, le Fortarock a beaucoup de qualités : le vaste parking est gratuit et se situe à peine à cinq minutes de marche du site, tout est facilement accessible sur ledit site sans avoir besoin de marcher des kilomètres pour atteindre l’une ou l’autre scène, les bars, la nourriture ou les toilettes. J’ai rarement entendu un son d’une telle qualité de manière générale sur un festival, les lumières étaient également globalement soignées. Une affiche variée, le personnel hyper accueillant et la météo splendide ont aussi contribué à l’excellent week-end passé là-bas. Néanmoins, s’il y a un aspect négatif à signaler, c’est sans doute le prix élevé des tickets boissons (pas loin des 3€), comme lors de nombreux événements. Enfin, même si d’un côté c’est super qu’il n’y ait pas d’attente entre les groupes, d’un autre c’est parfois sportif d’enchaîner concert sur concert. Hormis ces petits détails, le bilan est donc hyper positif et je suis repartie ravie ! On ne sait jamais ce que l’avenir nous réserve, mais comme on dit : jamais deux sans trois… Alors, Fortarock, à l’année prochaine ?!