Ça pique un peu ce matin pluvieux du 4 novembre lorsque j’arrive à la Ferme du Biéreau. Sur le coup de dix heures, ce n’est pas encore la bière qui coule à flots, mais plutôt le café. Et tandis que le balai bruyant des caisses de matériel anime la cour, on s’affaire déjà côté scène. En effet, Pestifer se prépare à ouvrir la douzième édition de ce qui est sans doute le plus gros rendez-vous du metal en Wallonie : le Mass Deathtruction.

C’est à midi, comme prévu, que les Liégeois prennent possession des planches. Sous une lumière rougeâtre, le groupe accueille les premiers visiteurs avec « Defeat Of The Nemesis », titre issu de son dernier EP du même nom. La foule s’amasse au fur et à mesure de ce premier excellent concert qui alterne les morceaux de l’EP avec ceux de l’album « Expanding Oblivion » (2020) parmi lesquels on retrouve notamment l’excellent « Grey Hosts », parfait pour s’échauffer les cervicales. Les musiciens souriants semblent en forme, le set est carré, le son parfait : c’est de bon augure pour la suite des festivités !

Pour ma part, je fais l’impasse sur Raum, le temps de saluer les copains et de savourer une première bière dans la fraicheur du bar extérieur. Et c’est bien vite que la déferlante espagnole, munie de son thrash explosif, déboule sur scène pour terminer de nous réveiller. En effet, il aura fallu moins de deux morceaux à Crisix pour déclencher les premiers pogos. Les musiciens ont le sourire communicatif et le set est survolté. Aucun doute qu’ils étaient attendus et ils n’ont pas déçu leur audience !

Vous connaissez l’expression « deux salles, deux ambiances » ? Eh bien, elle tombe à pic quand on enchaîne avec les Français de Hats Barn qui se produisent sur la seconde scène. Le groupe évolue dans cet espace confiné, éclairé à la bougie et où les effluves d’encens se mélangent à ceux du sang, parmi les carcasses d’animaux. C’est un black metal sombre qui habite et transcende le frontman, nous offrant un sinistre rituel. Un bémol cependant : le son est brouillon et pour avoir vu Hats Barn par le passé, je ne pense pas qu’il s’agissait là de la volonté du groupe.

Parlons encore une minute de la seconde scène, si vous voulez bien. Étant donné que les concerts s’enchaînent très vite et que le « Mass Death » constitue aussi un moment de convivialité, je fais le choix d’éclipser une partie des concerts qui s’y déroulent, plutôt axés black, ce qui est loin d’être mon style de prédilection. Aussi, même si un espace pour les photographes est prévu, il est difficile d’accès si on ne s’y rend pas suffisamment à l’avance, d’où l’absence de clichés pour cette partie du festival.

Retour sur la scène principale, donc. Et on poursuit avec les ovnis du jour, tout de cuir et de clous vêtus, tout pectoraux luisants apparents, les sulfureux Suédois (aujourd’hui mi-Suédois, mi-Texans à vrai dire) d’Enforcer font monter la température d’un cran et nous ramènent, dans un tourbillon de riffs incisifs et accrocheurs, dans les eighties. Un vrai bonheur : c’est catchy, c’est dansant, ça fait du bien !

Et on replonge dans les abysses avec Asagraum et leur black occulte. Cette formation exclusivement féminine ne laisse pas indifférent et le public est attentif à la présentation de quelques titres issus de leur dernier album « Veil Of Death, Ruptured ». Tout à fait personnellement, je suis impressionnée par le charisme de la bassiste, Makhashanah, qui est la seule à se mouvoir sur scène, ses collègues demeurant assez statiques. Malheureusement, la musique me semble répétitive et ne me parle pas vraiment.

D’autres Suédois, ceux de Demonical, nous offrent ensuite un death produit dans les règles de l’art qui ravit les amateurs. Pour ma part, ce n’est pas ma tasse de thé, mais j’apprécie tout de même l’engouement qui enveloppe la salle et un morceau assez groovy retient mon attention, « Välkommen Undergång ».

Je serai également brève en ce qui concerne Whiplash, car malgré un set extrêmement bien joué par ces pontes du thrash américains, ce n’est vraiment pas mon truc. Une des fiertés belges, Brutal Sphincter, retourne ensuite la seconde scène, comme à chaque fois que le groupe passe quelque part. Dès lors, c’est vraiment compliqué d’y accéder, mais de loin, on comprend que la fête bat son plein !

Place ensuite au plus beau voyage musical de la soirée, celui proposé par Wolfheart qui, avec son death metal mélodique, nous emporte loin. À cette heure, l’alcool y est peut-être aussi pour quelque chose, mais ce set a un petit goût de magie. La musique est envoûtante, tantôt agressive, tantôt mélancolique. Le mélange des voix et des ambiances est parfaitement équilibré et la qualité du son permet d’apprécier pleinement ce petit moment hors du temps. Un vrai coup de cœur pour moi qui ne connaissais pas ce groupe originaire de Finlande.

Et presque sans transition, c’est Coffin Feeder qui nous ramène à la réalité. Trois mots pour ce super groupe mené de front par Sven, chanteur d’un autre fer de lance de notre riche scène belge, Aborted : dans ta gue*le ! C’est juste un concentré de violence, ultra rapide et très peu mélodique. Et s’il nous reste quelques dents à la sortie du moshpit, on est parés pour affronter l’apothéose de la soirée, soit l’un des piliers du thrash allemand : Destruction ! Autant vous dire que je n’étais pas hyper ravie à l’idée d’écouter plus d’une heure de metal old school, mais je ne m’attendais pas à une telle claque. Les musiciens débordent d’une énergie communicative et offrent une prestation réglée au millimètre, c’était incroyable !

Enfin, la fatigue se fait tout doucement sentir, la tête est un peu lourde à force d’acquiescer sur les rythmes effrénés qui se sont enchaînés au fil des heures et les pieds sont endoloris d’avoir piétiné toute la journée entre les scènes, le bar, mais aussi le merch, qui avait un vaste espace dédié à l’étage de la grande salle. Mais c’est pourtant loin d’être en douceur que l’on termine les hostilités. En effet, ce sont d’autres Allemands, ceux de Stillbirth, qui sont chargés de nous chanter une berceuse avant d’aller au lit. Le décor comporte des planches de surf, les musiciens jouent en maillots de bain et ce sont les rescapés qui créent des vagues dans le public au son de leur brutal death festif.

Enfin, que dire de plus après tout ça, hormis que cette journée passée au Mass Deathtruction était, une fois de plus, excellente ? L’ambiance générale était chaleureuse pour contrebalancer la météo morose et le public était au rendez-vous, malgré le risque pris par l’organisation de proposer une affiche aussi éclectique. J’espère y retourner l’an prochain !